Les producteurs de musique sont-ils honnêtes ?

Ce billet un peu polémique est issu d’une sorte de prise de conscience, à la suite de diverses discussions.

Les producteurs de musique défendent, selon leur discours dominant, le droit d’auteur contre de la menace du téléchargement illégal. Or, qu’est réellement que le droit d’auteur pour l’utilisateur final lorsqu’on y réfléchit de près ? Pour moi, il s’agit d’acheter le droit d’accéder à une œuvre pendant une période définie. Par exemple, j’achète à une major du disque le droit d’écouter un artiste indéfiniment en payant le CD correspondant.

Or que nous proposent ces producteurs ? Un support physique, sous la forme d’un CD, qui contient la musique ou le film dont nous achetons les droits perpétuels. Ce support est par définition non pérenne. La durée de vie d’un CD n’est pas illimitée, sans parler des possibles casses et pertes. Les producteurs nous vendent donc très cher (cf. le prix des CD musicaux) un service qu’ils n’assurent pas.

A contrario, Apple et Amazon nous vendent bien un droit perpétuel : lorsqu’on change d’iPod ou d’iPhone, on peut recouvrir sa musique depuis iTune Store pour la consulter sur un autre support ; lorsqu’on change de Kindle, on peut recouvrir ses eBooks sur le site Amazon.

De la même manière, les plateformes de vidéo à la demande (cf. ce billet) nous vendent un droit d’accès ponctuel à une œuvre, qu’elles assurent effectivement.

Et le modèle de « licence globale » de Spotify assure bien le service payé par l’utilisateur, quelle que soit son interface physique.

Je pense donc que les plateformes numériques de musique / vidéo / ebook  sont la seule manière de vendre honnêtement des œuvres à des utilisateurs. Les producteurs qui essaient de faire perdurer les modèles du passé sont dans l’erreur, dans un paradigme caduque. Pour moi, l’équilibre de la période précédente ne reviendra pas : Kodak et Polaroïd n’ont pas eu la possibilité d’empêcher l’avènement de la photo numérique, les producteurs de musique/films ne pourront pas résister indéfiniment à une évidence.

Personnellement, je pense même qu’un autre paradigme est en fin de vie : celui de la possession des œuvres. Pour moi, seul le modèle de consommation à la demande des musiques / films / livres perdurera. Et la meilleure façon d’accéder à une œuvre est de voir l’artiste la présenter…

Guillaume Plouin

DSI La Fresque du Climat (ONG) Responsable du domaine Systèmes d’Information et Technologies du Digital à CentraleSupélec EXED.

Cet article a 4 commentaires

  1. Saloucious

    Je ne suis pas vraiment convaincu que les « e-stores » fournissent un droit perpétuel :

    Quid de Amazon dans 15 ans ?

  2. Pirmin

    Je suis d’accord que le mouvement qui va dans le sens d’une dématérialisation complète des œuvres musicales et même de la procession des fichiers est naturel et irréversible à long terme.

    Sur un plan philosophique je le trouve même souhaitable dans la mesure où une œuvre musicale n’est à l’origine pas destinée à être possédée. Toutefois il ne faut pas sous-estimer je crois, le désir de possession qui habite nos esprit occidentaux, il ne sera pas si facile de s’en défaire. Peut-être qu’on rejoint là d’ailleurs une problématique plus générale qui est celle du difficile passage d’une économie de la possession à une économie, plus durable, de l’usage. Une petite anecdote personnelle: bien que je suis un utilisateur enthousiaste de Spotify, je me suis surpris à récemment à acheter, sur iTunes, un album qui me plaisait beaucoup (le dernier Iggy Pop !).

    Désir de possession quand tu nous tiens !

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